Lorsqu’elles sont combinées, les « entreprises Facebook » en savent énormément sur vous.

Début 2021, un changement de politique de confidentialité mal communiqué a provoqué un exode massif de WhatsApp appartenant à Facebook. Au cours de la semaine suivant l’annonce – qui a vu WhatsApp demander aux utilisateurs d’accepter une nouvelle politique ou de supprimer leurs comptes – les téléchargements de son rival Signal ont augmenté de 35 fois pour atteindre 8,8 millions, provoquant le plantage de ses serveurs. D’autres sont passés à Telegram, qui a été téléchargé 11 millions de fois au cours de la semaine suivant la mise à jour de la confidentialité.

Le tollé est survenu après que des millions de personnes ont mal interprété les nouveaux termes de WhatsApp pour signifier que davantage de données seraient partagées avec son parent Facebook. Ce n’était pas le cas : la mise à jour de la politique de WhatsApp couvre la façon dont les gens communiquent avec les entreprises, et les données partagées avec Facebook restent les mêmes.

Pourtant, le changement de politique et le contrecoup qui en a résulté ont mis en évidence les grandes quantités de données que WhatsApp peut collecter depuis son acquisition en 2014 par Facebook. Spoiler : c’est quand même beaucoup. Mais six mois plus tard, WhatsApp est toujours de loin l’application de messagerie la plus populaire, avec deux milliards d’utilisateurs.

D’autres sociétés appartenant à Facebook collectent et partagent encore plus de données. La politique de confidentialité d’Instagram est presque identique à celle de Facebook, et les deux peuvent librement échanger des informations pour vous servir de la publicité.

Alors, quelles données Facebook obtient-il réellement de WhatsApp et d’Instagram, et existe-t-il un moyen de limiter la quantité d’informations siphonnées vers le géant des médias sociaux ?

Quelles données WhatsApp peut-il partager avec Facebook ?

Tout d’abord. WhatsApp ne partage pas le contenu de vos discussions avec Facebook et cela ne changera pas après la mise à jour des conditions de service. Les messages sont privés. Vos messages, y compris les photos, les vidéos et les appels, sont protégés par un cryptage de bout en bout, ils ne peuvent donc pas être lus par les forces de l’ordre ou WhatsApp lui-même.

Les données que WhatsApp peut partager avec Facebook incluent votre numéro de téléphone et le nom de votre profil. De plus, des informations plus détaillées sous-jacentes au message, appelées métadonnées, y compris la date d’envoi et votre adresse IP, peuvent être collectées et partagées avec les « sociétés Facebook ».

Contrairement à la RDC et plusieurs autres pays Africains, L’Union Europeene et le Royaume-Uni sont protégés par un règlement général sur la protection des données (RGPD) et la loi sur la protection des données, qui limitent le partage de données dans ces régions. WhatsApp affirme que les métadonnées ne sont collectées et partagées dans l’UE qu’à certaines fins, par exemple si les forces de l’ordre lui demandent de le faire.Il reste à imaginer, quand est-ce que ce genre de lois seront mises en application chez nous.

Les métadonnées sont un outil précieux pour analyser les contacts entre les personnes, explique Rowenna Fielding, fondatrice et directrice du cabinet de conseil en confidentialité Miss IG Geek. « Lorsque vous examinez les métadonnées, il s’avère que la plupart du temps, vous n’avez même pas besoin du contenu des messages, car les modèles d’activité en disent long sur quelqu’un. Ce n’est pas seulement « X est sur le téléphone de Y », c’est « X est sur le téléphone de Y et ils s’envoient des messages tous les soirs vers 20 heures pendant une heure ». Vous pouvez alors commencer à extrapoler des inférences ou des relations et créer des graphiques sociaux.

WhatsApp indique que les données ne sont partagées avec Facebook qu’à des fins telles que la prévention du spam, et non à des fins publicitaires. Il précise que WhatsApp ne partage pas vos contacts avec Facebook pour son propre usage, et qu’il n’y a « aucun projet de le faire ». WhatsApp nie également que ses données soient utilisées pour informer l’algorithme de Facebook People You May Know, mais le réseau social a été critiqué pour des incidents tels que le moment où il a recommandé aux clients des travailleuses du sexe de les ajouter comme amis.

Certains partages de données de WhatsApp restent opaques. Par exemple, la politique de confidentialité de WhatsApp décrit comment les données personnelles partagées avec Facebook « peuvent inclure d’autres informations identifiées dans la politique de confidentialité….ou obtenues sur notification ou sur la base de votre consentement ».

En vertu du RGPD, Facebook et ses entreprises devraient respecter les exigences de responsabilité en fournissant des informations complètes et bien expliquées, déclare Fielding. Elle dit que parce que ce qui arrive aux données n’est dans de nombreux cas pas clair, “il est impossible de dire exactement où vont les données, ce qui est un problème”.

Le changement de confidentialité de WhatsApp, qui malgré un retard initial est toujours en cours de déploiement, couvre la façon dont vous communiquez avec les entreprises qui utilisent son API. Les discussions WhatsApp entre les personnes et les entreprises sont cryptées de bout en bout lors de leur transmission, mais suite à la récente mise à jour de la confidentialité, elles peuvent être stockées une fois reçues par une entreprise à l’aide d’un service hébergé sur Facebook.

“Le changement de politique de confidentialité permet aux entreprises de stocker vos discussions WhatsApp une fois qu’elles les reçoivent, sur des serveurs hébergés sur Facebook, et donc en dehors du cryptage de bout en bout”, a déclaré Zak Doffman, PDG de la société de technologie de surveillance Digital Barriers. “WhatsApp dit que Facebook ne peut pas utiliser ces données, mais l’entreprise peut exploiter les chats pour faire de la publicité.”

Après un retard initial, la mise à jour des conditions d’utilisation de WhatsApp commence à être déployée dans le monde, mais elle pourrait encore faiblir dans l’UE, où elle fait l’objet d’une enquête des autorités.

Quelles données Instagram partage-t-il avec Facebook ?

Instagram partage beaucoup de données avec Facebook. Sa politique de confidentialité décrit comment le réseau social « connecte les informations sur vos activités sur différents produits et appareils Facebook » pour offrir une « expérience plus adaptée et cohérente ». Par exemple, il peut vous suggérer de rejoindre un groupe sur Facebook qui comprend des personnes que vous suivez sur Instagram ou avec lesquelles vous communiquez via Messenger.

Facebook et Instagram partagent l’infrastructure, les systèmes et la technologie avec d’autres sociétés Facebook. Cela signifie que les informations partagées depuis WhatsApp sur les comptes qui envoient du spam peuvent être utilisées pour agir sur Facebook, Instagram ou Messenger.

Instagram peut également collecter votre emplacement, votre lieu de résidence, les lieux que vous visitez et des détails sur les entreprises et les personnes proches pour « fournir, personnaliser et améliorer les produits Facebook », y compris les publicités, pour « vous et les autres ».

Pourtant, malgré une collecte et un partage de données volumineux, Instagram a moins de contrôles de confidentialité que son parent, explique Jake Moore, spécialiste de la cybersécurité à la société de sécurité ESET. “Instagram a moins de contrôles de confidentialité que Facebook et vous ne pouvez pas empêcher le partage de la plupart de vos données entre les plateformes, mais vous pouvez ajuster la façon dont certaines informations sont utilisées.”

Par exemple, dit-il, Instagram partage vos données de localisation avec Facebook, mais vous pouvez restreindre l’accès de l’application à vos allées et venues et limiter l’audience à vos publications dans vos paramètres.

Limiter le partage des données

Les entreprises Facebook sont nombreuses, dont Facebook lui-même et son service Messenger, ainsi que 91 acquisitions par le réseau social comme WhatsApp, Instagram et Oculus. Limiter le partage de données entre Facebook et ces sociétés est un défi, en particulier compte tenu du suivi et du profilage qui se produisent entre le réseau social et d’autres sites sur le Web.

« Chaque site Web, la plupart des applications et des détaillants, des lieux de divertissement et des fournisseurs de services transmettent vos données à Facebook », explique Fielding. Au moins cinq millions de sites Web utilisent les trackers Facebook Pixel, et les gens donnent plus de leurs données via l’API Login With Facebook, qui vous permet de transférer les informations de profil Facebook vers d’autres applications et sites Web. “Cela ajoute une énorme quantité de pouvoir sur votre expérience en ligne, vos croyances et vos interactions”, explique Fielding.

Pourtant, vous pouvez prendre certaines mesures pour arrêter le partage de données Facebook en général, explique Fielding. « N’utilisez pas d’applications qui s’adressent à Facebook, n’achetez pas de produits dépendants de Facebook, utilisez Facebook dans votre navigateur et non dans l’application, si vous devez le faire. Restez en dehors d’Instagram, supprimez WhatsApp ou séparez les listes de contacts par contexte et ayez un téléphone de travail séparé. N’utilisez jamais quoi que ce soit avec « alimenté par Facebook » dessus. »

En même temps, l’application de messagerie sécurisée Signal bénéficie du fait qu’elle n’appartient pas à Facebook et, selon les étiquettes de confidentialité de l’App Store d’Apple, n’a pas besoin de grandes quantités de données pour fonctionner. « Signal est beaucoup plus axé sur la sécurité et la confidentialité en tant que plate-forme et correspond le mieux à l’offre de WhatsApp », déclare Moore.

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Cet article est écrit par : Dieudonné I. Munganga